La Révolte est une analyse philosophique des révoltes métropolitaines qui, avec la fin du monde bipolaire, ravagent sans trêve les alchimies du pouvoir global. Une analyse qui se développe en présentant une série de matériaux au travers desquels la révolte n’apparaît pas simplement comme un mouvement insurrectionnel hostile à tout pouvoir constitué et aux formes organisées de révolution politique. La thèse est ici plus radicale : la révolte est un événement qui manifeste une inclination fondamentale de l’existence humaine.
Dans la perspective entrouverte par le lien entre la politique et l’existence, et à l’ombre d’un démon classique de la philosophie (l’ambition d’intégrer la théorie et la praxis), La Révolte est né avec l’intention de démontrer que les mouvements urbains capables d’inquiéter le pouvoir global des dernières années (songeons aux révoltes de Los Angeles, Gênes, Athènes et en particulier à celles des banlieues parisiennes) ne sont pas, comme on le considère généralement, des formes violentes d’antipolitique, mais qu’elles constituent au contraire la sédimentation d’un événement politique capable de provoquer la rupture des formes qui nous gouvernent.
La problématique au fondement de cet essai est la suivante : « La révolte est une action politique qui dérange la mise en scène de la démocratie à laquelle nous assistons quotidiennement ». La révolte ôte son masque au Léviathan, pour porter à l’ontogenèse de l’homo seditiosus.
Par la révolte, la réalité de la démocratie est révélée. Le souverain se trouve contraint de s’affirmer comme la loi, en même temps que comme son exception. C’est l’ordre démocratique tout entier qui se configure ainsi, tel un exorcisme global, qui peut et doit utiliser toute la violence nécessaire (économique et symbolique, avant d’être militaire et policière) afin d’empêcher le fantôme de revenir. L’ordre simple de la violence est inversé.
La centralité bio-politique que Pierandrea Amato attribue à la révolte ne signifie pas que celle-ci s’oppose à la révolution. Elle la précède plutôt, et la dépasse. La révolte se place à un niveau différent de celui de la révolution, parce qu’elle manifeste une image de la temporalité différente. Alors que la logique de la révolution se développe avec une conception linéaire du temps, la révolte exprime une temporalité liée à l’événement, à l’irruption du temps dans le temps. Cela amène une relation différente avec le pouvoir : si la révolution pense que l’accès au pouvoir est le fondement de la transformation de la singularité, la révolte imagine au contraire que la mutation de la singularité dans l’acte révoltant est le principe de la transformation de ce qu’elle est.
Recension par Joël Jégouzo (1er mars 2011).