rechercher

lettre d'information

couverture de SUR LE SENS ET L'USAGE DU MOT « GAUCHE »
80 pages - 9,00 €
Éditions Lignes

SUR LE SENS ET L’USAGE DU MOT « GAUCHE »

Postface d’Alphonse Clarou

La campagne pour l’élection présidentielle est le théâtre de nombreux conflits de propriété lexicale-politique, en particulier à gauche. Ce livre (1955) projette loin devant lui des définitions non seulement utiles, mais peu sujettes à contestation – le ton en est à tout instant sans concession.

Réédition au format poche de l’ouvrage épuisé initialement paru en 2011, complété d’une préface d’Alphonse Clarou.

Dionys Mascolo rappelle pour commencer comment s’est historiquement constitué le mot « gauche » (quel a été son premier « usage »). Il oppose ensuite que l’accord, qui semble ne pas faire de doute sur le « sens » qu’il y a lieu de donner politiquement à ce mot, constitue en réalité un malentendu. Ainsi, peuvent être dits de gauche – et le sont en effet – des gens qui n’ont rien en commun entre eux. Ce qui fait que la gauche, comme on s’en plaint souvent, est déchirée. Déchirée, elle l’est par nature (mille divisions la caractérisent). Parce qu’être de gauche, affirme Mascolo, c’est « refuser ». Refuser ; quand être de droite, c’est accepter. Faut-il pour autant récuser la commodité et le malentendu du mot « gauche » ? Non, son incertitude est riche au contraire.

On pourrait s’arrêter là, où tout semble clair. Tout est clair en effet à ce niveau, mais ce niveau est celui du libéralisme bourgeois. Ce dont il faut déduire que l’emploi du mot « gauche » n’a de sens qu’à un certain niveau d’appartenance à la bourgeoisie : «  La distinction gauche droite […] sert à distinguer entre eux des bourgeois », tranche Mascolo. Autant dire qu’elle n’opère qu’une distinction superficielle, impuissante à se porter à la hauteur de la politique ainsi que Mascolo la représente et en juge. Distinction dont il fait dans ce texte une description longue et fine, qui la rattache au régime de l’opinion, pas de la pensée.

Ainsi donc la question est mal posée que Mascolo a posée lui-même en titre de son texte. Parce que « gauche » devient relatif, circonstanciel, volatil, impondérable, etc., dès l’instant qu’on l’oppose à « révolution » : «  C’est par rapport au projet révolutionnaire que la gauche laisse voir son sens, et non par rapport à la droite – posture où l’on peut se fixer, comme au bord d’un vide où l’on sait bien qu’on ne se jettera pas, quand même on s’obstinerait à en savourer l’attirance sa vie durant.  » Phrase qui marque qu’il y a plus d’opposition, une opposition radicale, entre être de gauche et être révolutionnaire qu’entre nourrir des opinions de gauche et des opinions de droite. Seule la révolution réunit tous les refus séparés qui la déchirent dont se constitue la gauche, en un seul, solide, massif, irrémissible refus où est leur unité constitutive.

Être révolutionnaire, ce n’est pas être un peu plus de gauche, c’est même ne pas l’être. Différence essentielle, qu’on méconnaît à gauche, que la gauche nie, sur laquelle Mascolo s’attarde volontiers. Qu’il suffise d’en dire ici ceci seulement : qu’il y va pour lui de la pensée, ou, plus exactement, de la théorie révolutionnaire. « Le seul critère qui puisse unifier tous les refus de gauche dans l’acte simple du refus révolutionnaire, c’est la définition matérialiste de l’homme comme homme de besoin. » Affirmation centrale chez lui dont l’ambition – démesurée peut-être – était de reprendre le communisme au parti qui se l’était approprié et la révolution au pays qui affirmait l’incarner.

Nous faisons suivre « Sur le sens et l’usage du mot “gauche” » d’un texte plus court, complémentaire : « Contre les idéologies de la mauvaise conscience », paru une première fois dans La Quinzaine Littéraire n° 107 (1-15 décembre 1970).

« C’est dans la nature de la gauche d’être "déchirée" » : recension par Arnaud Viviant sur le site lesinfluences.fr

Dionys Mascolo (1916-1997), résistant, écrivain et philosophe, proche de Marguerite Duras et de Robert Antelme, quitte le PCF en 1949 où il était entré au lendemain de la guerre. En 1953, il publie son oeuvre maîtresse Le Communisme. Antigaulliste et anticolonialiste, il crée la revue Le 14 juillet et est l’un des rédacteurs, avec Maurice Blanchot, de « La déclaration sur le droit à l’insoumission dans la guerre d’Algérie » (Le Manifeste des 121). En 1987, il publie Autour d’un effort de mémoire, sur une lettre de Robert Antelme, aux Éditions Maurice Nadeau.

Recension par Émile Carme sur Ballast (février 2015).

Partager sur  
Éditeur : Éditions Lignes
Prix : 9,00 €
Format : 11 x 18 cm
Nombre de pages : 80 pages
Édition courante : 4 mars 2022
ISBN : 978-2-35526-207-4
EAN : 9782355262074