Comment échapper à l’horreur ? C’est la question que pose Frédéric Neyrat, dans ce court livre qui propose une théorie générale de l’horreur et son contrepoison philosophique. L’auteur commence par dresser le constat suivant : terreur et frayeur règnent aujourd’hui sans partage dans le domaine politique (recul de la démocratie), environnemental (changements climatiques), international (terrorisme islamique), économique et social (effets délétères de la dérégulation néo-libérale). Cependant, quel est le point commun entre tous ces phénomènes, pourquoi génèrent-ils un sentiment d’horreur ?
À cette question, l’auteur répond par la thèse suivante : l’horreur est ce qui se répète. Car l’horreur n’a qu’un seul message, elle dit et répète : je reviendrai, encore et encore, continûment la mort succèdera à la mort, le génocide au génocide. Dès lors, comment s’opposer à l’horreur ? Frédéric Neyrat répond ainsi : si l’horreur est ce qui se répète, alors faire cesser l’horreur exige d’interrompre la répétition. A la réitération de l’horreur, l’auteur oppose les « interruptions merveilleuses » qui éloignent, ne serait-ce qu’un temps, la menace d’une épouvante sans fin.
Dans la première partie de cet ouvrage, l’auteur montre que si l’horreur s’avère toujours possible, le merveilleux est une figure de l’impossible.
La seconde partie étudie neuf de ces figures : l’amour, la beauté, le poème, le bien, la folie, le sauvage, l’extra-terrestrialité, le rêve, et l’éveil.
La troisième partie interroge la logique de l’interruption révolutionnaire, montrant que la politique radicale à venir aura deux enjeux : empêcher que le futur ne soit qu’un objet d’épouvante, c’est-à-dire désactiver les possibles désastreux, et reprendre les promesses d’émancipation qui ont été laissées en plan, c’est-à-dire exiger l’impossible.
Convoquant littérature et poésie (Baudelaire, Beckett, Breton, Conrad, Ellis, Lovecraft, Lukács, Oppen, Reverdy), cinéma d’horreur (Argento, Carpenter, Lynch), cinéma de science-fiction (Spielberg), et philosophie (Adorno, Arendt, Benjamin, Badiou, Descartes, Kant, Schmitt, Tronti), ce « court traité des interruptions merveilleuses » est l’antidote aux peurs qui nous empêchent de croire au bien, à la beauté, et à la justice.