Avis aux naufragés est une chronique du capitalisme en crise. Cet ouvrage rassemble les articles que Robert Kurz a publiés dans les presses allemande, autrichienne et brésilienne. Ce livre constitue la suite du Manifeste contre le travail, lequel propose une théorie critique du capitalisme néo-libéral ; il s’en distingue en ceci, cependant qu’il traite de « questions d’actualité » (impérialisme, écologie, droits de l’homme). Pour autant, la théorie n’est pas oubliée en chemin : elle fonde l’analyse, elle en est l’arrière-plan.
Pour Kurz (qui reprend la théorie de Marx), le capitalisme repose sur une contradiction interne. D’une part, il se nourrit de l’absorption d’énergie humaine à travers la dépense de la force de travail ; d’autre part, il impose, via la concurrence, une augmentation permanente de la productivité, qui tend au remplacement du travail humain par celui des machines.
Jusqu’alors, cette contradiction (cause de toutes les crises précédentes) a pu être surmontée par l’extension des marchés à de nouvelles couches de consommateurs. Or, avec la troisième révolution industrielle (la microélectronique), ce mécanisme de compensation ne suffit plus. Pour la première fois, l’innovation des procédés (méthodes d’organisation, de production et de distribution) va plus vite que l’innovation des produits. C’est pourquoi l’on voit le capital-argent refluer vers les marchés financiers et engendrer des bulles spéculatives. Le capitalisme a atteint sa limite objective.
Si ce recueil traite de « questions d’actualité », c’est au sens de l’actualité appelée à durer. Chômage structurel de masse et liquidation de l’État social dans les pays du « centre capitaliste », économie de pillage et guerres d’ordre mondial dans les pays de la périphérie… Kurz rend tous ces phénomènes à leur intelligibilité en les inscrivant dans leur vrai cadre : le mode de production capitaliste en voie d’implosion. Lorsque Kurz dit que le monde capitaliste part en morceaux, il ne prophétise pas : il montre ce qui est déjà à l’œuvre. Toutefois, il n’en reste pas à ce constat critique, il indique aussi en quoi pourrait consister un début de lutte réelle, mobilisatrice, tournée vers un monde nouveau. Pour Kurz, les termes de l’alternative sociale sont : une société débarrassée du travail et de la marchandise, ou la barbarie mondialisée.
Dans la presse :
Un « salutaire exercice de lucidité pour qui veut comprendre l’inhumanité de ce système »,
Charles Jacquier, Le Monde Diplomatique